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La due diligence d’un immeuble existant est souvent perçue comme la cartographie des éléments réglementaires, techniques et architecturaux dont on mesure la vétusté ou l’obsolescence, avec la projection du coût de leurs remplacements associés dans le cadre d’un programme projeté de travaux.

Cette évaluation économique est le plus souvent le parent pauvre des audits ; faute de temps laissé aux acteurs d’affiner leurs réflexions, ou tout simplement faute de références sur le marché. L’approximation dont il procède est aussi parfois le fruit d’une déférence naturelle vis-à-vis du mandant. Il n’est pas aussi complètement inconvenant d’afficher un coût approximatif, à défaut d’un coût réel, en première approche sans que d'aucuns  sachent le "storytelling" précisément.

Cependant cette cartographie élémentaire, aussi utile que nécessaire soit-elle, attendue avec impatience par les assets afin de déterminer le « hard cost » dans leur business plan, ne doit pas pour autant faire l’économie d’une approche plus ciselée. La due diligence ne doit pas se résumer à un simple diagnostique dont elle n’a pas le statut.

En premier lieu, une due diligence réussit ce doit appréhender l’immeuble étudié dans son histoire "bâtimentaire"; le situer dans un inventaire de typologies de bâtiments construits au fil du temps. L’histoire ancienne ou plus récente, sa place dans cette dernière, nous en apprendra bien plus sur ses pathologies physiques auxquelles nous allons être confronté indubitablement (enjeux) et les limites de certains traitements thérapeutiques (les risques).

Par exemple, après l’amiante, les assets très soucieux d’offrir sur le marché des immeubles dépollués s’attaquent d’avantage à la l’élimination du plomb lors de la transformation de leurs actifs. Cependant la présence du plomb dont la réglementation ne fixe pas stricto sensu d’obligations aussi strictes que celle de l’amiante, a la fâcheuse tendance de migrer dans des supports poreux (plâtre, certain ciment, bois). Si son traitement par extraction semble "aisé" sur des supports solides (l’acier), le "déplombage" peut se révéler inadéquate sur certains supports. En effet, à vouloir parfois le supprimer sur des supports en plâtre vous pouvez vous retrouver avec des teneurs encore plus importantes car il aura pu migrer avec le temps au cœur du mur ou contaminer d’autres surfaces par transfert pendant les travaux. Aussi comprendre que les immeubles haussmannien, construit en 1870 et 1920, souffrent tous peu ou prou de cette pathologie et que la peinture au plomb n’a cessé d’être utilisé véritablement qu’après 1948 avec la refonte du code du travail, l’enjeu de la due diligence sera de prime abord d’en circonscrire le risque :

En posant la question au Maître d’Ouvrage de la nécessité de soigner complétement une pathologie inerrante à l’actif ?

En proposant surtout d’identifier, et hiérarchiser les éléments susceptibles d’être traités ou pas.

L’histoire de l’immeuble nous renseignera également sur le choix des systèmes constructifs adoptés, et par conséquent les limites techniques et financières auxquelles le maître d’Ouvrage sera confronté. En effet le squelette d’un bâtiment qu’il soit maçonné, coulé ou assemblé par une ossature, porte dans sa méthodologie constructive, sa trame, des contraintes et des avantages dissymétriques qu’il faut nécessairement appréhender dans l’évaluation du potentiel de transformation.

Fort de cette compréhension de l’environnement la due diligence pourra auditer sereinement:

• Les aspects administratifs et règlementaires

• La logeabilité (l’occupation théorique et effective)

• Les équipements techniques (CVC, CFO, CFA)

• Les travaux de second œuvre

Le cas échéant étudier l’opportunité de viser des certifications environnementales, ou les cibles potentielles. En effets aussi bien les unes que les autres ne sont pas tous adaptés à l’actif sans entrainer des surcoûts hors de portée. On pourra alors privilégier des approches moins affichables peut-être mais plus vertueuses ; la frugalité par le réemploi ( lire notre article "la régénération passe par la frugalité" ) , l’autosuffisance énergétique…

S’agissant de l’évaluation économique, l’approche standard la plus pertinente, à défaut d’un projet aboutit à cette étape, demeure d’évaluer des quantités (même imprécises), par corps d’état ou sous ensembles, auxquelles on applique des ratios issus d’analyses de précédentes opérations, enrichis le cas échéant de coefficients de difficultés, d’inflations, de gammes, ou d’imprévus. Le tout pourra être varianté des brainstormings des différents acteurs.

Enfin selon les actifs et l’étendu de la due diligence, des études  capacitaires par changement de destination pourront être envisagées.

Une due diligence réussit est un document itératif certes, qui doit être cependant coconstruit pendant son élaboration afin permettre un arbitrage du mandant en révélant les enjeux, les risques et les coûts des scénarios étudiés.

Auteur : Stéphane SIWON

Publié le 13 février 2023

Mis à jour le 19 octobre 2024

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