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L'environnement et le pragmatisme ne font pas bon ménage en cette rentrée automnale.

Pour être au clair, le pragmatisme est une doctrine qui donne du crédit ou de l'efficacité à ce qui par nature fonctionne. Ce n'est pas l'incrédulité à l'épreuve des sens. (Saint Thomas)

Quant à l'environnement(alisme), elle devient une doctrine qui tache de poser les postulats de nos actions qui agissent sur le vivant et l'activités humaines.

Il s'agit pas ici de remettre en cause notre responsabilité collective et notre inaction individuelle parfois coupable. Nous partageons tous (enfin je l'espère) qu'il va de soi que nous avons à changer nos pratiques énergivores pour plus de sobriété dans l'acte de construire.

Cependant il faut bien l'avouer l'ascension est raide et l'hypoxie nous guette avec la confusion des esprits qui l'accompagne. Rappelons également que dans chaque doctrine il y a aussi une part de croyance, et l'environnement n'y échappe pas malheureusement. C'est dans cet égarement collectif que les prescripteurs, forcés par le politique, édictent de nouvelles normes et règlements en contraction avec le bon sens parfois, et en espérant que nous nous adapterons par obligation et nécessité en référence de la théorie de Darwin. En effet! A ceci près, que l'homo sapiens (l'homme qui pense) a connu 200.000 ans d'évolution. L'urgence climatique, nous oblige à réagir avec célérité. Cependant la précipitation n'est pas toujours bonne conseillère.

Les immeubles que l'on conçoit aujourd'hui sont de plus en plus sophistiqués. Afin de répondre aux exigences performancielles nous participons collectivement au concours Lépine avec des solutions techniques innovantes que l'on peut clairement afficher mais dont les mises en œuvre et le bien-fondé interrogent.

Peut-on se questionner sur le Label Bâtiment Biosourcé? l'impasse de l’utilisation du bois...

Le béton c'est pas bon! l'intégration de matériaux biosourcés bon pour le bilan carbone, vous incitera à construire en bois ou en introduire fortement pour obtenir un effet de masse. Cependant la filière de cette matière première en France est chimérique.

Je peux en parler ici librement. Nous avons été confronté à cette problématique lorsque nous avons voulu développer SYCOPAN un système novateur de murs et de dalles composé notamment en bois. A un moment clef de notre recherche le constat fut sans appel: Une exploitation exsangue par un parcellaire inadapté (Petit, détenu par de nombreux propriétaires, accidenté parfois), des séchoirs trop peu nombreux, des entreprises sous équipées (Ponts roulants sous dimensionnés, engins), une industrie lourde de transformation inexistante! Notre découverte fut de comprendre amèrement que l'essentiel des massifs forestiers exploités en France étaient exportés au nord et à l'est de l'Europe pour nous revenir transformés par camion!

Sans être sarcastique on peut naturellement s'interroger sur l'envie irrépressible de vouloir généraliser son usage?.

Aujourd'hui l'idée la plus communément véhiculé est que "L'utilisation du bois dans la construction permet d'améliorer la performance énergétique des bâtiments. De plus, elle participe à la lutte contre le réchauffement climatique via l'absorption de CO2 lors du cycle de croissance des forêts"

Malheureusement sans une filière adéquate difficile d'y souscrire sans réserve et dans les faits la Préfecture de Police de Paris a condamné l'usage du bois dans la construction sauf à l'isoler du feu. On rajoute donc au mille-feuilles une couche carbonée. Pourquoi avoir restreint son usage? Les sapeurs-pompiers, légitimement, n'ont pas envie de passer de vie à trépas en raison des émanations de gaz lorsque le bois brule!

La croyance du politique et des Maîtres d'Ouvrages conduit parfois à des impasses où l'on monte les marches pour mieux descendre.

Rétrospectivement j'interroge les Maîtres d'Ouvrages soucieux de leur empreinte carbone: "Comment estimeriez-vous financièrement un superbe immeuble très récent de bureaux en structure bois (type CLT) qu'il faudra calfeutrer à terme? "

Le pragmatisme ne serait-il pas d'utiliser des bétons "décarbonés" ou à décarboner d'avantage? N'est-ce pas au pouvoir public d'organiser la filière bois vu l'étendu des manquements avant de vouloir généraliser son usage? En attendant, ne devrions-nous pas inciter d'avantage sont emploi pour ces qualités indéniables dans le second œuvre?

La mantra : "Economiser de l'énergie, isoler vous!" des solutions qui laissent perplexe!

C'est à l'image des Isolations Thermiques Extérieures (ITE) en Polyuréthane, Polyester, Polystyrène, Poly...inflammables et installés pour beaucoup sur les parcs sociaux rénovés dont la pérennité n'est pas assurée.

Souvenez-vous simplement de l'incendie spectaculaire de l'immeuble collectif à Londres en 2017. Cette pratique est toujours autorisée. Il y a des affichages idéologiques qui peuvent coûter chers dans tous les sens du terme!

Le pragmatisme serait l'emploi d'isolants minéraux. Comme tout minéral il faut l'extraire, le transformer et nuire forcément à votre bilan carbone. Hors réhabilitation (remise à l'état neuf), le traitement par l'Isolation Thermique Intérieur (ITI) ne sera jamais amortie par l'économie d'énergie attendue au regard des travaux colossaux qu'il induit de reprise, le plus souvent en milieu occupé, et la consommation de CO2 pour y parvenir. On comprend mieux les limites de l'exercice de décarbonation.

Le cuivre, le contre-exemple.

Si je prends volontairement cet atome (Cu) si particulier et singulier pour sa capacité à conduire le courant, c'est qu'il va nous permettre de poursuivre notre "voyage en absurdie" où une Architecte des Bâtiments de France parvient à l'imposer pour refaire une toiture Haussmannienne visible de personne. Les vols en navette spatiale sous le ciel parisien sont interdits! Rappelons simplement qu'au Chili l'extraction de cet atome très demandée par d'autres industries sous tensions, s'oxide en une jolie couleur bleu/vert recherchée par les architectes (Bon, il devient également gris avec le temps), assoiffe les villages et pollue l’environnement avec un coût élevé en terme de Carbone. Le Cuivre pourraient être épuisées en 2050. (ADEME)

Il faut croire que les obligations des uns ne concernent par les autres. Le pragmatisme voudrait que l'on puisse s'en affranchir pour des raisons esthétiques et le laisser à ceux qui ne peuvent s'en passer. Nous pourrions plutôt privilégier la tôle d’acier galvanisée architecturale ou le zinc plus durable, à défaut d'autoriser à Paris d'autres matériaux ou conceptions.

Ils sont certes polluants mais par leur effet volume sont soit moins sensibles aux tensions du marché, soit bénéficieront de programmes de décarbonation (1,7 milliard pour décarboner des hauts fourneaux vont être investit par l'Etat) .

Mais Madame Patouche a dit: "pas touche!". Rassurons-nous et soyons optimistes cette matière première est recyclable et d'une durée de vie exceptionnelle (+100 ans).

Les bons et les mauvais points des certifications HQE, BREEAM, LEED...

Nous devons admettre que les bons points sont pour l'essentiel des rappels des bonnes pratiques dans l'acte de construire mais si vous voulez atteindre le nirvana des étoiles, des médailles aux métaux précieux (or, platine) et le Graal des mentions "very", "excellent", "exceptionnelle" les mauvais points peuvent vite s'accumuler.

En soi ils ne sont pas "mauvais", simplement les points des uns contredisent les points des autres et comme au concours Lépine toutes les innovations n'en sont pas.

Par exemple, pour la thème "Qualité de l'habitat" et obtenir vos points "Confort Visuel" par le critère "Facteur Lumière du Jour" (FLJ) vous serez amenés à concevoir des immeubles sans façade nord, ou sans vis-à-vis, ou réduire la taille de votre pièce à la portion congrue (en deçà de la surface indiquée par la loi), ou élargir vos baies au détriment de l'habitabilité et de l'isolation. C'est cornélien...

Par contre pour des bureaux si vous souhaitez obtenir le Graal, on vous imposera des stores sur la façade ne bénéficiant pas d'ensoleillement. C'est comique ...

Pour économiser l'eau des sanitaires, il vous faudra adjoindre à vos robinetteries, elles-mêmes référencées pour leurs qualités par des labels, des détecteurs fuites, des batteries d'électrovannes commandées par des détecteurs de présence. Un défaut mineur dans toute cette belle mécanique, peut vous conduire aux toilettes sèches...

Les exemples sont nombreux. Par moins de 150 dispositions par label à faire évaluer pour s'assurer que votre bâtiment obtiendra le scoring souhaité. Attention aux chausse-trappes !

Peut-on faire autrement ?

Jean-Marc Jancovici nous dit "la sobriété (énergétique), c'est renoncer à l'usage de la voiture au profit du vélo". Ne pourrait-on pas renoncer en partie aux mille-feuilles des bonnes intentions?

Construire c'est polluer car l'énergie déployée pour y parvenir est considérable. Ne pourrait-on pas regarder, plus encore, les nouvelles normes et règlements qu'on nous propose à l'aune de la durabilité, la pérennité, des risques induits, du recyclage potentiel et pas seulement effectif, du bilan carbone des matières premières transformées au regard de leurs durées de vie?

Ne pourrait-on pas mesurer les gains effectifs des systèmes préconisés au regard d'autres enjeux de même nature? En d'autres termes, pour en revenir à nos fuites dans nos toilettes, sont-elles plus importantes que celles des réseaux urbains collectifs(1)? et les solutions préconisées sont-elles pérennes? l'énergie déployée pour les mettre en œuvre offrent-elles une efficience indiscutable?

Je vous rassure, je n'ai pas de réponses à vous apporter. C'est simplement le constat d'un praticien parfois dubitatif où "la maladie (de l'environnement ou la notre) oscille entre la précipitation et la négligence"(GOETHE) .

Tout l'enjeux dans ce concours Lépine des innovations ou des bonnes intentions est de trouver la juste adéquation entre le coût production et le coût énergétique induit (= coût carbone). Pour les plus matheux cela pourrait se traduire par une courbe avec la fonction f(x)=1/x.

Selon où vous vous positionnez sur l'axe des abscisses (coût énergétique), vous constaterez que le coût de production (en ordonnée) devient très vite colossal au regard des très faibles gains énergétiques enregistrés. Aussi pour éviter les déboires, faites le bon choix au risque d'être sans choix.

(Nota (1) :Le taux de fuite, c'est-à-dire le rapport entre volume d'eau introduit dans le réseau de distribution et le volume d'eau consommé, est de l'ordre de 20% en France).

Auteur : Stéphane SIWON

Publié le 15 octobre 2022

Mis à jour le 19 octobre 2024

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